Spectateur et/ou acteur d’une Europe à (re)faire ?
Les dirigeants européens, ainsi que
les personnels gouvernementaux ont décidé de créer entre eux des coordinations
renforcées en court-circuitant totalement les interrogations des peuples et des
populations de l’Europe, et parfois du Parlement européen. Ils se décrédibilisent
moins qu’on le dit ou le croit habituellement par ces décisions. Ils
remplissent plutôt le rôle pour lequel ils ont été sommés d’agir ainsi. Et ils
ont logiquement refusé de poser les conditions de possibilité de rapports
civils entre les européens.
Leur silence à l’égard des
citoyennes et des citoyens européens relève pour beaucoup du dédain dans lequel
on peut tenir les peuples. Ils ne nous laissent voir, par presse interposée,
que leurs états d’âme, évitant ainsi de conduire au jour la grammaire complexe
de l’exercice du pouvoir, dans un cadre européen qui se restreint de plus en
plus à l’Union monétaire.
Le Spectateur européen reviendra bientôt sur le dernier ouvrage de Jürgen
Habermas, Zur Verfassung Europas, Ein Essay (Suhrkamp Verlag, Berlin,
2011 ; tradition française : La
constitution de l’Europe, Gallimard, Paris, 2012).
En
attendant, ces considérations nous engagent à nous réinterroger sur une
question qui traverse toute la modernité, celle du spectateur et de l’acteur de
la politique. Sachant que les positions prises actuellement nous restreignent à
la position de spectateur en nous dépouillant de notre fonction d’acteur. Or un
tel spectateur sans devenir aussi acteur s’annule dans sa capacité à
comprendre, comme un acteur dépouillé de sa capacité à observer se dissout.
En attendant, la situation brûle même
si nous ne sentons pas encore les difficultés engendrer les pires exactions. Déjà
la place très conséquente prise par les extrêmes droites, les réactionnaires et
les fondamentalistes de tous bords en Europe noircit le ciel européen. Ce ne
sont pas des convulsions révolutionnaires qui se donnent à voir, mais des
violences racistes, exclusives et identitaires pour lesquelles nous ne pouvons
avoir aucune magnanimité.
En un mot, nous devons imposer le
renoncement rapide au pouvoir oligarchique et bureaucratique qui est censé
conduire nos « affaires publiques ». Nous devons non moins cesser
d’attendre des prodigalités comme nous y sommes habitués par les systèmes prébendiers
auxquels nous nous sommes habitués. Nous devons donc imposer dans un premier
temps la réhabilitation de la société civile, avant de faire des choix plus démocratiques
pour une Europe d’une autre facture.
Aussi proposons-nous dans ce numéro
3 de l’année 2012, une série de réflexions autour de la question du spectateur
et de l’acteur, au sein même de la culture européenne, à partir de
l’ouvrage : L’archipel des
spectateurs, Besançon, Editions Nessy, 2012.
Distributeur :
CEI, 37 rue de Moscou, Paris 75008, ou sur le site : éditionsnessy.fr