20070207

editorial

La culture européenne n'est pas une affaire d'identité, d'origine ou d'unité-homogénéité.
Nous rejetons d'emblée cette hypothèse comme mortifère.


La culture européenne n'existe pas sous la forme d'un sol, d'un socle, d'un territoire, d'un lieu, d'un recueil des sources ou d'un passé que nous aurions à sanctifier. La culture européenne correspond moins à ce qu'on peut en dire qu'à ce qu'on peut en faire. Si une culture européenne peut se forger, c'est en obligeant les européens à se frotter les uns aux autres, en jouant de leurs langues, des familiarités de leurs cultures, les unes contre les autres, non pas au sens d'une logomachie, mais au sens d'une confrontation. Une telle culture, à venir, doit se penser à l'intersection de toutes les lignes de force culturelles qui s'élaborent, pour l'heure, chez tous ceux qui veulent s'extraire des bornes nationales. Et ceci, sans que l'une ou l'autre langue ou culture puisse servir de vérité aux autres.
Le Spectateur européen, qui, aux côtés de l'association les Architoyens, se donne pour objet de servir de lieu de rencontre à ceux qui souhaitent participer à la construction d'une culture européenne, veut faire entrer en interactions des citoyennes et des citoyens, des chercheuses et des chercheurs, des acteurs culturels de toutes sortes, afin de constituer un Observatoire de la culture européenne.
Un observatoire qui rend compte de ce qui peut se dire et se penser d'un peuple européen à un autre. Et un observatoire qui favorise des actions collectives organisant des archipels de rencontre entre ceux qui veulent faire de l'Europe un lieu de ressources théoriques et un lieu d'ouverture sur l'ensemble du monde. La culture européenne d'un peuple européen est évidemment à venir. Nous ne prétendons pas nous substituer à eux. Nous ne pouvons parler ni au nom d'un peuple européen existant ni au nom d'un peuple européen à venir. Il ne peut donc s'agir, dans le Spectateur européen, que de créer un collectif d'énonciation visant la constitution d'un peuple. Et si nous ne savons pas ce que va être ce peuple, nous pouvons du moins pressentir qu'il importe moins de définir une communauté d'existence ou de coexistence que de rendre possible une forme de devenir collectif.