20100105

L'invention des continents

Paris, Larousse, 2009.
Christian Grataloup

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Why must a compass point North? Who discovered Oceania? How many continents are there: five, as the French believe, or six, as do the English? Is Turkey part of Europe? If one thing holds true, it is our traditional representation of the world. The logic seems straightforward: continents are like big islands, therefore they are nature’s doing. But this segmentation has a history, has imposed itself gradually, and has always been subject to different points of view (those of explorers, geographers, merchants or colonialists), necessarily belittling in their classifications. “I cannot understand why the earth, which is one, has received three different names, all those of women”, wrote Herodotus. In his beautifully illustrated book (edited in France by the Larousse Publications), from the fascinating medieval world maps to baroque ceilings, from Renaissance allegories to the imperialist sculptures decorating chambers of commerce, Christian Grataloup takes us on a journey to discover our own vision of the planet, fragmented, contradictory, contestable and constantly tampered with.

The biggest climate conference in history opened in Copenhagen with a stark reminder of the consequences of a failure to act on global warming, but also with assurances that a legally-binding deal is within reach. Organizers and delegates were reminded of the intense public interest in events in Copenhagen when they were handed an online petition signed by 10 million people around the world demanding that leaders sign up to a "fair, ambitious and binding" climate treaty. The petition is an initiative of TckTckTck, an umbrella organization of 226 environmental groups. Yes, but we have now to surch something about the words. And this article gives us the rule of a nomination.

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Γιατί, όταν θέλουμε να προσανατολιστούμε, οι πυξίδες δείχνουν προς τον Βορρά; Ποιος ανακαλύψε την Ωκεανία; Πόσες ήπειροι υπάρχουν ; Πέντε, όπως θεωρούν οι Γάλλοι , ή έξι, όπως πιστεύουν οι Άγγλοι; Η Τουρκία αποτελεί μέρος της Ευρώπης; Αν υπάρχει ένα πράγμα που φαίνεται αυτονόητο, είναι η παραδοσιακή μας απεικόνιση του κόσμου. Το σχέδιο φαίνεται απλό: οι ήπειροι θα ήταν πολύ μεγάλα νησιά, επομένως ένα φυσικό φαινόμενο. Και εντούτοις, αυτή η διαίρεση έχει μια ιστορία, που επιβλήθηκε βαθμιαία, και ήταν πάντα υπόθεση διαφορετικών απόψεων (εκείνων των εξερευνητών, των γεωγράφων, των εμπόρων ή των αποικιοκρατών), και που ήταν απαραιτήτως περιοριστικές μέσα στην ταξινόμησή τους: Δεν μπορώ να καταλάβω, έγραφε ο Ηρόδοτος, γιατί η γη, που είναι μια, έχει τρία ονόματα, τα οποία είναι ονόματα γυναικών… Μαγευτικοί μεσαιωνικοί χάρτες των δύο ημισφαιρίων με οροφές μπαρόκ, αλληγορίες της Αναγέννησης με ιμπεριαλιστικά γλυπτά των εμπορικών επιμελητηρίων, δηλαδή ένα υπέροχο ταξίδι διαμέσου της θεώρησης που έχουμε για τον πλανητη, που είναι αποσπασματική, αντιφατική, και ακατάπαυστα αναθεωρημένη, στην οποία μας προτρέπει ο Christian Grataloup, μέσα σε ένα έργο που έξοχα εικονογραφημένο, το οποίο εκδόθηκε στη Γαλλία, από τις εκδόσεις Larousse (2009).

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Die Klimakonferenz in Kopenhagen ist eröffnet, die Zahl der besorgten Appelle nimmt zu. Dabei ist für die meisten Politiker und Experten klar: Wichtig ist es, gesellschaftliche Blockaden in Sachen Klimaschutz zu lösen. Zum Auftakt der UN-Klimaschutzkonferenz in Kopenhagen wird allerorten eifrig appelliert, gemahnt und gehofft. Auch der Gastgeber der Veranstaltung machte da zu Beginn des Klimagipfels keine Ausnahme: Die zweiwöchige Konferenz sei die "Hoffnungsträgerin der Menschheit", sagte der dänische Ministerpräsident Lars Loekke Rasmussen am Montag (07.12.2009) bei der offiziellen Eröffnung vor den 1200 Delegierten aus 192 Ländern. Der Däne fand dabei klare Worte: Rasmussen nahm alle Länder der Welt beim Klimaschutz in die Verantwortung. "Der Klimawandel kennt keine Grenzen, er betrifft uns alle", sagte der skandinavische Spitzenpolitiker. Mit welchem worten heissen wir aber die continenten. Hier ist eine Lösung.

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Kıtaların gerçekliği tartışılır mı? Neden tartışılmasın? Sonuçta bu konuda bile pek çok ülke farklı düşüncelere sahip. Örneğin Fransızlar Dünyanın 5 kıtadan oluştuğunu öne sürerken, İngilizler dünyada 6 kıta olduğunu savunuyorlar. Bir başka mesele ise Türkiye'nın coğrafı olarak Avrupa'ya ayit olması. Kimisi Avrupa'da diyor, kimisi değil diyor. Aslında anlamamız gereken dünyayı oluşturan kıtaların da bir tarihe dayandığı ve dünyanın kesiminin doğal olmadığı aksine insanların ve tarihin neticesi olduğudur. Herodot " dünyaya verilen 3 isminin de kadın ismi olduğunu hiç bir zaman anlamadım" derdi. Yani İnsnalar, kıtaların kesimini belirlemiştir, isimleri verilmiştir. Dolaysıla coğrafyanın "doğal" olduğunu öne sürmek ve siyası cözümlerini buna göre belirlemek büyük bir yanlıştır.

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Pourquoi, lorsque nous cherchons à nous orienter, les boussoles indiquent-elles la direction du Nord ? Qui a découvert l'Océanie ? Combien y a-t-il de continents ? Cinq, comme le pensent les Français, ou six, comme le croient les Anglais ? La Turquie fait-elle partie de l'Europe ? S'il y a bien une chose qui semble aller de soi, c'est notre traditionnelle représentation du monde. Le schéma semble simple : les continents seraient de très grandes îles, donc un fait de nature. Et pourtant, ce découpage a une histoire, il s'est imposé peu à peu, et a toujours été affaire de points de vue (ceux des explorateurs, ceux des géographes, ceux des commerçants ou des colonisateurs), nécessairement réducteurs dans leur classification : Je ne peux comprendre, écrivait Hérodote, pourquoi la terre qui est une a reçu trois noms, qui sont des noms de femmes... Des fascinantes mappemondes médiévales aux plafonds baroques, des allégories de la Renaissance aux sculptures impérialistes des chambres de commerce, c'est à un formidable voyage à travers notre vision de la planète, fragmentaire, contradictoire, contestable et sans cesse retouchée, que Christian Grataloup nous convie, dans un ouvrage illustré magistralement, publié en France, par les Editions Larousse (2009).

Voici ce que l’auteur nous apprend : "La division du Monde en continents fait partie du socle le plus solide de notre vision du cadre de l'écoumène. Sans que la notion soit sérieusement construite: pour la plupart d'entre nous, un continent est tout simplement une grande île. Pourtant, il s'agit de représentations lentement élaborées par la pensée occidentale qui auraient pu être tout autres. Une lecture médiévale littérale de la Genèse recyclant des termes gréco-latins fut laïcisée au XVIème siècle et s'imposa ensuite en particulier grace à une iconographie foisonnante des "4 parties du Monde". Le processus est parachevé par l'érection de ces catégories mentales en domaines géographiques dans le cadre des Lumières qui, en traçant leurs limites, achèvent d'en faire des "îles", des objets naturels.

Derrière cette division peu problématique se cache une subjectivité européenne qui se révèle aujourd'hui de plus en plus décalée par rapport aux dynamiques du Monde contemporain. Des mappemondes médiévales aux fresques baroques, L'invention des continents suit la piste de problèmes géopolitiques très contemporains."

Voici quelques feuillets de l’ouvrage à nous transmis par leur auteur et leur éditeur.

« Tout commence au cœur du monde grec, qui n’aurait su, chez ce peuple de marins, être terrestre. La matrice grecque n’est pas la pointe des Balkans que nous nommons aujourd’hui Grèce, mais la mer Égée, de la Crète à la Thrace, de l’Eubée à l’Ionie, avec ses périphéries, le Pont-Euxin (la mer Noire) en particulier. Deux termes grecs permettent d’en désigner les rives où sont les principales cités : Asié pour l’arrière du littoral oriental et Europé pour la côte occidentale. Le terme Asié apparaît au début de l’Iliade, où il désigne un paysage de prairie. La première occurrence d’Europé se rencontre dans un texte un peu plus tardif, l’Hymne homérique III, à Apollon, chant religieux grec archaïque, pour désigner la Grèce continentale au nord du golfe de Corinthe. Il semble que son étymologie soit effectivement « vaste terre ». Europé, terme dont la racine sémitique évoque le levant, est mieux connue comme personnage mythologique, la princesse phénicienne dont Zeus fut amoureux, parmi bien d’autres conquêtes, et qu’il enleva après s’être transformé en un superbe taureau blanc. Il partit avec elle vers le Couchant, vers l’Ouest, jusqu’en Crête.

Un troisième terme fut ultérieurement ajouté, celui de Lybié pour désigner la rive méridionale de l’aire de navigation, de la Thalassa hellénique, les côtes septentrionales de notre Afrique. Les Romains reprirent ces termes et les latinisèrent, en gardant le féminin générique : Asia, Europa et Libya. Europe connaît donc une réorientation : plutôt l’Occident à l’origine, elle en vient à désigner l’au-delà de la rive nord, le terme d’Africa servant plutôt à nommer la province romaine correspondant à l’actuelle Tunisie. Hérodote, dans ses Histoires, fait allusion à la tradition, déjà constituée au 5ème siècle avant J.-C., d’un découpage du monde en trois qui ne le satisfait guère :

« Je ne peux comprendre pour quelle raison la terre qui est une a reçu trois noms, des noms qui sont des noms de femme, ni pourquoi on lu a imposé comme frontières le Nil d’Egypte et le Phase de Colchide (selon d’autres, le fleuve Tanaïs de Méotide et les détroits de Cimmérie). Je n’ai pu apprendre les noms de ceux qui ont fait ces délimitations, ni d’où ils ont tirés ces dénominations. Désormais, en effet, la plupart des Grecs disent que la Libye tire son nom de Libyè, une femme autochtone, que l’Asie s’appelle ainsi d’après Asieus, fils de Kotys, fils de Maneus, et non d’après Asiè, femme de Prométhée. Pour cette raison, la tribu de Sardes s’appelle Asias. On ignore si l’Europe est entourée par la mer et d’où elle tire son nom, et celui qui le lui a attribué est inconnu. Du moins, nous dirons que ce pays a reçu son nom d’Europe de Tyr. Avant, il était anonyme comme les autres parties » (Hérodote, Histoires, IV, 45 ; traduction de Christian Jacob).

Les Arabes, plus fidèles aux Romains, ont conservé le mot, Ifriqiya (l’Afrique), pour désigner la Tunisie, l’est de « l’Île du Couchant » (Djeziret el Maghreb, dont la partie centrale a gardé le mot signifiant île en arabe, Al Djazayïr/l’Algérie). Dans les textes anciens, l’usage des futurs noms continentaux n’était pas ni très fréquent, ni rigoureusement fixé ; rien de bien surprenant qu’au Moyen Âge le terme « Afrique » ait été préféré à Libye.

Pour les Grecs comme pour les Romains, parler de continents, au sens littéral du terme, serait un contresens. Les noms propres féminins qui ont été ultérieurement utilisés pour les parties du monde indiquent plutôt des directions : le nord, le sud ou l’est de la Mare Nostrum comme « Atlantique » désigne la région du couchant. Leur utilisation n’est guère éloignée de celle des points cardinaux. De tels usages sont d’ailleurs peu fréquents. Asia et Africa sont surtout des noms de provinces. A partir du IVème siècle, à Constantinople, pour désigner l’est de la mer Egée, on utilise le terme « Anatolie » (νατολή, « Le Levant » en grec, anadolu en turc). En dehors de ces pratiques administratives, Afrique et Asie ne sont pas des toponymes et ne peuvent être transformés en adjectifs ou en substantifs désignant des habitants. Un habitant de Phocée aurait tout autant été surpris d’être qualifié « d’asiatique » qu’un Athénien « d’européen ».

Cela ne veut pas dire, cependant, que l’idée d’un découpage du monde en parties était totalement étrangère aux auteurs antiques. Les ouvrages de géographie descriptive, les œuvres d’Hérodote et de Strabon en particulier, parce qu’elles sont construites sur des logiques de classement des peuples, pratiquent un découpage régional du monde. Les noms qui sont choisis par les Pères de l’Eglise comme toponymes pour les « fiefs » attribués aux fils de Noé n’étaient donc que des possibles dans un stock de vocabulaire plus large. Mais ce choix a connu une fortune considérable qui fait qu’aujourd’hui nous connaissons tous les noms d’Afrique, d’Asie et d’Europe. »

Nous ne pouvons qu’encourager nos lecteurs à se reporter à l’ouvrage complet, L’invention des continents, Paris, Editions Larousse, 2009.

Christian Ruby